Mbour_
- Alice
- Nov 6, 2018
- 2 min read
Updated: Jul 4, 2019
Ma première sortie à Mbour est tôt le matin, pour aller chercher de l'eau, du papier toilette et une "puce Orange" comme on dit ici. Parfois il faut revenir à l'essentiel.
Je joue ma rebelle et je sors seule. On a parcouru la ville en voiture hier et je vois par où rejoindre le centre, les rues au bout du compte forment un échiquier presque parfait. J'essaie de me perdre un peu, emprunter les ruelles secondaires, mais c'est tout de suite trop intime. Les portes sont ouvertes, les animaux et les enfants entrent et sortent de partout, les gens s'adonnent à leurs occupations dans la rue. La frontière entre espace privé et public s'efface, se déplace, s'étire. Tout est extrêmement paisible.
Ça va mieux quand je rejoins le carrefour de la nationale près de la mairie. C'est une fourmilière bruyante où on ne peut qu'être inclus. Le monsieur qui m'aide à trouver l'agence Orange s'offre de me montrer son travail. Il s'avère être un vendeur de souvenirs qui réussit à m'enquiquiner la jolie somme de 8000 francs (12 euros) pour trois bracelets. Oui c'est ça, comme une débutante.
Je suis énervée par ma sottise, et j'ai faim. Je tourne en rond sans savoir me décider à rentrer dans un des magasins d'alimentation générale, petits et sombres, qui gardent la marchandise derrière des grilles. L'Auchan que nous avons longé hier soir à l'entrée de la ville me tourne en tête, je marche et je m'arrête plusieurs fois, tiraillée entre désir et culpabilité. Je finis par rejoindre cet autre non-lieu bien connu et m'acheter des biscuits de chez nous. Comme une débutante.
Manifestement le temps d'adaptation ici va être plus long que partout ailleurs. Je rentre chez la famille qui m'accueille, il y a un groupe de personnes inconnues assises dans la cour qu'après un signe de tête minimaliste reprennent à discuter en wolof. Je les observe aller et venir, assise pas loin, cinq, dix, quinze minutes, jusqu'au moment où ma place devient inconfortable. Je monte m'allonger dans la chambre. Je suis découragée, j'ai envie de récupérer mon sac, de me changer, de rentrer chez moi avec le premier vol. Puis une des jeunes filles de la maison toque à la porte: le déjeuner est prêt.
Je m'assieds avec elle et ses cousines autour d'un grand plateau d'aluminium. "J'espère que la bouffe sénégalaise va te plaire!". Elle ouvre le couvercle, me présente le plat (dont j'oublie aussitôt le nom) qu'on mange toutes les quatre directement du plateau avec notre cuillère. De temps en temps l'une d'elles coupe un légume et en fait rouler la moitié vers mon côté de l'assiette, geste qui me cause un émoi directement proportionnel à son naturel.
Allez Alice, arrête. Peut être que c'est plus simple que tu ne le crois.
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