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Préraphaëlitiquement_

  • Writer: Alice
    Alice
  • Aug 13, 2020
  • 2 min read

Et nous arrivons ainsi à Shiraz, la ville des jardins. Des jardins urbains où les habitants cherchent à soulager la chaleur en s'allongeant preraphaëlitiquement sous les buissons de roses, et des jardins en faïence qui recouvrent les murs des édifices en briques ocre. C'est, on dit, la seule ville d'Iran où les céramiques sont peintes avec sept couleurs différentes, au lieu des trois ou quatre habituelles, et la prédominance du rouge et rose obtenus de la poudre d'or les rend d'autant plus précieuses; le centre, avec son harmonie architecturale, me fait penser à d'autres villes, comme Florence.


On pourrait penser qu'à la troisième ou quatrième mosquée elles puissent commencer à paraître toutes les mêmes; Shiraz est venue nous démentir, car ici les temples n'ont pas de coupole et la décoration florale de ses portails est tout à fait inédite. Ils sont moins impressionnants que les saphirs d'Isfahan, mais tout aussi raffinés et au même temps plus frais, plus saisibles, plus enveloppants. Sur certains carreaux on peut voir représentés des paysages européens avec des maisons et des églises de campagne. Ces détails improbables on les doit, paraît-il, à la passion du maître d'ouvrage pour les voyages: un jour il revint d'Angleterre avec un paquet de cartes postales et demanda aux maîtres céramistes de les reproduire pour lui.


Au jardin Narenjestan-e Ghavam il y a un pavillon au porche recouvert de miroirs scintillants au soleil. Au sous-sol ce qui est annoncé comme un musée des manufactures est en réalité une galerie commerçante d'artisans locaux. Tout au fond se trouve la pièce des instruments de musique, qui m'attire particulièrement. Deux hommes et une femme sont assis en train de converser, mais le propriétaire du commerce s'interrompt pour nous saluer. Il nous demande si on est musiciennes, puis il commence à nous expliquer quelles sont les familles d'instruments, dans quels pays ils sont joués et quelle manière de chanter ils sont censés accompagner - du diaphragme et de la gorge, de la gorge et du nez ou du nez et de la tête. Pour nous aider à comprendre il chante quelques lignes de trois chansons différentes mais aux sonorités également denses et intenses, comme il me semble typique de la musique du moyen orient. Ou en tout cas je sais que moi cette musique ça me prend aux tripes, et je suis en extase pour ce petit concert privé.


On s'arrête discuter quelques minutes. Les autres sont aussi des musiciens et ensemble nous racontent de la difficulté de faire de leur art un métier, en Iran. À cette période de célébrations religieuses, par exemple, la musique live est interdite, et il nous assurent que personne n'aimerait être saisi par la police en train de jouer; seulement dans deux mois ils pourront recommencer les concerts.

Est-ce que nous avons risqué gros en nous laissant pousser la chansonnette l'autre jour à Kashan? Ça ne va peut-être pas aussi loin mais l'idée qu'un moyen d'expression aussi archaïque et fondamental pour l'Homme puisse être assimilé à un crime me bouleverse.


On dit au revoir aux trois en leur souhaitant bonne chance, et en promettant de revenir à une autre période de l'année, quasiment en exprès que pour pouvoir les applaudir.



 
 
 

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