Trente jours en Afrique_

Un, pour plonger dans le noir. Deux, pour me sentir étrangère. Trois, pour retrouver mon sac et mon courage. Quatre, pour goûter le thiebou diène. Cinq, pour apprendre à négocier. Six, pour acheter l'impensable. Sept, pour être le septième passager sur une voiture à cinq places. Huit, pour discuter de la vie et de l'humain devant une Gazelle. Neuf, pour m'inventer un mari très occupé à Mbour. Dix, pour avoir horreur du tourisme sexuel. Onze, pour constater que la vraie teranga est rare, mais elle existe. Douze, pour siroter un thé fort comme l'homme, douce comme la femme et sucré comme l'amour. Treize, pour manger trop de cacahuètes. Quatorze, pour danser au rythme des djembés. Quinze, pour avoir mal partout le jour d'après. Seize, pour me rendre à la lenteur. Dix-sept, pour apprendre à passer le temps là où le temps n'existe pas. Dix-huit, pour manger une mangue avec les mains et avoir le jus qui coule jusqu'aux coudes. Dix-neuf, pour apprendre trois mots en wolof et les oublier aussitôt. Vingt, pour me sentir seule. Vingt et un, pour apprécier la solitude. Vingt-deux, pour retrouver le plaisir de la compagnie. Vingt-trois, pour entendre parler de la Tabaski. Vingt-quatre, pour en savoir plus sur la Tabaski. Vingt-cinq, pour en avoir marre de la Tabaski. Vingt-six, pour regretter ce que j'ai quitté en partant. Vingt-sept, pour avoir peur de l'avoir perdu à jamais. Vingt-huit, pour avoir hâte de rentrer. Vingt-neuf, pour avoir envie de rester.

Trente, pour lâcher prise, pour assumer mes choix et mes erreurs, ma maladresse, mon courage, mon corps, pour relever les défis qui m'attendent et les obligations que j'ai délaissées, pour avoir peur et pour continuer, pour grandir, pour dire au revoir à Mama Africa avec la promesse de lui revenir.